UN BARBARE EN CHINE NOUVELLE
Alexandre Trudeau
Vous avez tourné un documentaire sur la Chine. Vous donnez maintenant un livre. Qu’est-ce que le livre peut dire ou montrer que le documentaire ne peut pas?
Dans le livre je propose une approche quasi documentaire et j’invite le lecteur à m’accompagner dans un long périple à travers la Chine. Un véritable documentaire passe très vite dans le temps. Il ne permet qu’un survol très rapide du sujet. Un livre peut arrêter le temps. Il permet d’ouvrir des brèches dans le récit par lesquelles il nous est possible de pénétrer très, très loin dans un sujet. Dans Un barbare en Chine nouvelle, je pense profiter pleinement de cette liberté littéraire face à l’espace et au temps.
Alors que la Chine nous semble traverser une transformation radicale, vous insistez surtout sur la continuité de sa culture et de sa civilisation. Pourquoi?
Une transformation radicale n’a pas vraiment de sens si nous ne considérons pas l’immensité et l’ancienneté de la culture qui est appelée à se transformer. De plus, je crois davantage à la sédimentation des idées qu’à leur disparition totale. Les ruptures absolues sont très, très rares.
Qu’avons-nous à apprendre de la « Chine nouvelle »?
La Chine nouvelle nous amène à une profonde réflexion sur la question de la liberté. À vrai dire, c’est en comparant notre histoire avec celle de la Chine que nous arriverons à bien cerner l’évolution de la liberté individuelle dans le monde occidental. En comparant la situation en Chine avec celle qui a régné dans le bassin Méditerranéen, par exemple, nous arrivons à mieux percevoir quels éléments géographiques, démographiques et politiques ont rendu cette liberté possible en Occident et non en Chine. Or, la Chine vit actuellement une période de libération socioéconomique intense. Elle continue à se libérer de son passé très contraignant. Parallèlement, je pense qu’il faut remettre en question la liberté individuelle à l’occidentale, aussi chère qu’elle puisse paraître à nos yeux. Elle fait trop abstraction des réalités environnementales et a été édifiée sur le dos de peuples qu’on a subjugués pas la politique ou par les armes. La trajectoire de la Chine nouvelle marque donc certainement un progrès. Mais comme, en Chine, on part de loin, il est possible qu’on y voie s’épanouir une forme de liberté plus équilibrée et mieux adaptée aux nouvelles réalités planétaires comme la diminution des ressources et la surpopulation.
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